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Le blog d' Isabelle de Scitivaux

"SCULPTER L'ESPACE" texte de Martine Guillerm

31 Octobre 2008, 23:43pm

Publié par isabelle de Scitivaux



Isabelle de Scitivaux conçoit ses sculptures à la mesure du lieu qu’elles investissent et du spectateur qui arpente les espaces. Le lieu d’exposition devient le matériau de sa sculpture autant que les fils métalliques ou de rotin qu’elle assemble et modèle pour créer des formes qui se déploient dans les salles. Elle réinterprète l’espace, propose une nouvelle lecture du lieu qui prend corps à travers les œuvres. Son art est contextuel, il prend en compte l’architecture du lieu, son histoire et sa charge émotionnelle.
Lorsqu’à Volterra elle crée un immense dragon dans une salle voûtée dont le sol est jonché de plumes de pigeons, sa sculpture entre en résonance avec l’histoire de la ville dont le blason s’orne d’un dragon et d’un griffon et dont les poignées de portes sont décorées de chauve-souris. Elle nous conduit dans un monde fantasmagorique où les plumes des oiseaux deviennent partie prenante de la fiction imaginée par l’artiste qui s’ancre alors comme par magie dans le réel.
De même, l’occupation de la galerie B de Nîmes par deux éléphants était née de la volonté de proposer une saturation de la pièce par un animal dont la présence et la densité étaient non pas perceptibles par des masses lourdes et pesantes mais par une occupation maximale de la galerie. L’un des pachydermes s’inscrivait dans l’espace d’une voûte et épousait les parois du mur à la manière d’un bas-relief, l’autre se déployait dans tout l’espace de la galerie. Cette écriture spatiale entre plein et vide, surgissement d’une forme et fragilité de la représentation est d’ailleurs une des constantes de son travail.
Influencée très tôt par la culture japonaise dont elle est proche par ses origines, elle travaille ses sculptures à la manière d’une calligraphe dont la technique nécessite non seulement une maîtrise de la main qui trace le signe, mais également un investissement de l’ensemble du corps et un contrôle des énergies qui le traverse. Comme dans la calligraphie, Isabelle de Scitivaux utilise l’ensemble de son corps pour créer ses pièces monumentales et arachnéennes. Le geste, la forme, l’idée ne sont qu’une seule et même chose et les solutions plastiques qu’elle invente sont toujours les plus simples, les plus évidentes, les plus concises.
Lorsqu’elle sculpte une montagne, elle prend appui sur le processus qui a engendré leur formation (poussée verticale et condensation) pour tendre les fils et les modeler en contrôlant chacun de ses gestes pour créer le volume désiré. Le mouvement qu’elle imprime au matériau tient également compte du passage du temps, de l’érosion qui adoucit les contours et sculpte le paysage. Pour cette pièce, le choix de l’échelle monumentale s’est imposé d’emblée, la sculpture devenant un véritable espace habitable dans lequel le spectateur peut entrer à la manière d’une architecture.
L’une des grande richesse de la sculpture d’Isabelle de Scitivaux est de permettre la multiplicité des points de vue sur les objets et d’agir sur nos perceptions. Suivant la position du spectateur la montagne se déploie ou se comprime, les lignes se superposent ou se séparent. L’artiste rend le spectateur actif, l’incite à se mettre en mouvement à questionner sa vision du réel.
Dans ses sculptures, le processus de création et d’assemblage n’est jamais caché, tous les points de liaison entre les fils sont visibles L’économie de moyens est toujours recherchée. Parfois la sculpture se double de son ombre portée par le biais de l’éclairage ou du reflet sur la surface miroitante d’un miroir d’eau ; la sculpture devient alors un véritable piège optique pour le regardeur.

Parallèlement à sa démarche artistique dans les galeries et les lieux traditionnels d’exposition, Isabelle de Scitivaux développe un travail en partenariat avec des enseignes telles que Lafuma ou plus récemment Le Printemps Haussmann. Dans le cadre de ce dernier projet, elle a conçu neuf sculptures de fleurs monumentales et d’insectes géants dont la lumineuse beauté irradiait jusque dans la rue. Tout d’un coup, le regard du passant est happé, ce dernier est invité à une expérience esthétique inattendue. Il s’arrête un instant pour contempler ces objets singuliers si éloignés des marchandises auxquels il est accoutumé . Ces créations sont pour l’artiste une manière de toucher un autre public, elles sont des manifestes, des objets poétiques et politiques inscrits dans la ville, qui transforment le quotidien et donnent à rêver d’un monde où l’art et la vie ne seraient qu’une seule et même chose.


Martine Guillerm


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D
Coucou Isabelle, pas mal du tout ton travail....J'attends de voir ça en 3 D....Ravi d'avoir partagé ce moment avec toi. À bientôt ? Biz
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